samedi, septembre 13, 2008

LNC : un sort identique à Céléos ?

Dans notre précédent article, notre ami Jester nous interpelle à propos d'un éventuel problème de cash flow que pourrait connaître les promoteurs immobiliers. Pour une meilleure lisibilité, nous recopions ici sa remarque et ensuite notre tentative de réponse.

"A noter que ce qui peut faire défaut ce n'est pas tant la baisse de l'ANR, mais un problème de cash flow. Et ça fini comme Celeos.C'est un élément que je prenais aussi peu en compte et qui pourtant est important des les périodes que nous traversons.Cela dit, je ne sais pas si c'est un problème réel pour LNC.C'est en tout cas ce qui à mon sens justifie la baisse d'Orco, même si pour l'instant je pense que ces craintes ne sont pas fondées."


Nous sommes tout-à-fait d'accord avec Jester : plus leurs engagements sont élevés, plus les entreprises doivent générer de cash flow pour y faire face.

Pour les promoteurs immobiliers, nous pensons que ce cash flow est généré par deux points essentiels : d'une part la rentabilité de l'entreprise proprement dite et d'autre part un bon équilibre entre les flux entrant (ventes d'immeubles) et les flux sortant (acquisition de
terrains et construction d'immeuble). Autrement dit, il est important de vérifier que même en cas de gros ralentissement immobilier, la société sera capable de maintenir ce flux, quitte à perdre en rentabilité.

Pour LNC, le fait que la marge de sécurité entre la valeur de l'actif circulant et l'endettement total de la société est élevée sur base des comptes clôturés au 31/12/2007 nous permet de penser qu'en cas d'étranglement financier, LNC pourrait "brader" son stock d'immeubles
(jusqu'à environ 20-25 % par rapport au prix de vente qu'elle pratiquait en 2007). La société pourrait présenter un bilan en perte (hypothèse que nous n'excluons d'ailleurs pas pour l'année 2009 voir l'année 2010) mais elle survivrait à la crise et pourrait repartir de l'avant avec un gros effet de levier à l'issue de celle-ci. Ce n'est évidemment que notre avis d'investisseurs amateurs, nous n'avons pas demandé conseil à Warren Buffet pour cet investissement.

Nous avons également tenté d'analyser les raisons de la déconfiture de Céléos afin de voir si des problèmes identiques ne pourraient pas surgir du côté de LNC. Voici le résultat de nos "élucubrations" :

Tout d'abord les "faiblesses" que nous pensons avoir détecté chez Céléos :

1. La direction :

De manière objective, on peut dire qu’elle a commis de lourdes erreurs en n’anticipant absolument pas le ralentissement immobilier :

- Beaucoup trop de personnel : au 31/12, Céléos occupait 450 personnes pour générer un chiffre d’affaires de 198 000 000 d’euros (en comparaison, LNC qui exerce exactement le même métier en France occupait 170 collaborateurs pour générer un chiffre d’affaires de 258 000 000 d’euros). Ce manque de contrôle des frais fixes rendait la société difficilement adaptable à un ralentissement conjoncturel. Et apparemment, les engagements se sont poursuivis en 2008 puisqu’on parle de 500 emplois perdus dans la presse …

- Malgré le fait que fin 2007 un ralentissement immobilier semblait inexorable, Céléos a augmenté son stock d’immeubles de 150 % ce qui augmentait encore sa vulnérabilité à la conjoncture.

-Bien que promoteur immobilier, Céléos exerçait également une activité de bailleur : elle détenait des immeubles en propres qu’elle mettait en location. Outre le fait que l’entreprise sort ainsi de son core business, elle immobilisait des capitaux supplémentaires dans une activité à priori peu rentable, capitaux qui lui auraient été bien utiles pour survivre à la crise.

-Sa présence concentrée sur seulement deux régions françaises la fragilise également en termes de diversification et de décorélation relative au niveau immobilier.

-Les fonds propres ne représentaient au 31/12 que 16,8 % du total de bilan rendant son indépendance financière assez alléatoire.

-Le sentiment que nous éprouvons en lisant les chiffres de vente du 1er semestre 2008 est que Céléos n’a pas réussi à réduire de manière importante son stock d’immeuble au cours de la première moitié de l’année. Ce n’est qu’une impression car nous ne disposons d’aucune
information pouvant confirmer ce phénomène.

-Le paiement d’un dividende 2 mois avant le dépôt de bilan (faisant ainsi perdre à l’entreprise de précieuses liquidités qui lui auraient été bien nécessaires) nous laisse pour le moins très
perplexes

Notre impression personnelle est que la direction n’a jamais connu qu’un marché immobilier en hausse (la société a 10 ans d’existence) et n’a pas compris que les très bons résultats de Céléos étaient dus autant à ce marché haussier qu’à leur qualité de gestionnaire. Ils ont du se prendre pour des cadors sans rien anticiper du tout.

2. Autres considérations :

-Des frais de gestion sur certains projets sont « stockés » au lieu d’être pris en charge, ce qui améliore artificiellement le résultat. Ce montant s’élève fin 2007 à 12 135. Autrement dit, sans
pratiquer ce type d’opération, le résultat de Céléos au 31/12/07 aurait été réduit d’au moins 65 % et ne se serait élevé qu’à 0,50 euros par action au lieu de 1,50 euros.


-Des variations de valeur pour les immeubles de placement ont été actées pour 1 558 euros. Sans cette écriture, le résultat aurait été amputé de 0,19 euros supplémentaires.

Autrement dit, sans ces deux articifices comptables (mais tout-à-fait légaux il faut le signaler), le résultat 2007 aurait été proche de 0, ce qui change pas mal les perspectives de la société.

- Au 31/12/2007, on trouve en stock des projets immobiliers terminés mais toujours invendus alors qu’il n’y en avait aucun au 31/12/06.

Tous ces faits étaient connus depuis la publication des comptes et tout-à-fait accessibles dans les rapports de gestion. La question de savoir si, ayant pris connaissance de tous ces faits, nous serions restés à l’écart de Céléos même à un cours massacré. Objectivement, nous sommes incapables de nous prononcer de manière catégorique.

De toute manière, notre intérêt personnel dans ce petit travail, est de vérifier que LNC ne présente pas les mêmes faiblesses que Céléos et qu’il ne conviendrait pas d’anticiper des problèmes identiques :

- Concernant la structure de frais : en France, chaque travailleur LNC a généré en 2007 en moyenne 1 517 000 euros de chiffre d’affaires alors que chaque travailleur Céléos avait généré 440 000 euros.

- L’augmentation du stock de LNC m’avait déjà alerté lors de la publication des comptes 2007. Cependant, elle est resté raisonnablement fixée à 38 % là où le stock de Céléos augmentait de
150 %. De plus, nous l’avons déjà abordé, on peut penser que ce stock a baissé sensiblement au cours du 1er semestre.

- LNC ne détient pas d’immeubles de placement.

-Géographiquement, LNC est présent sur 6 pays même si la France reste prépondérante et représente toujours 50 % des revenus du groupe.

- Au 31/12/2007, les fonds propres de LNC représentent 27,5 % du total de bilan, ce qui est beaucoup dans l’absolument mais permet une meilleure indépendance financière vis-à-vis des tiers.

-LNC a également payé un dividende qui met en joie les forumeurs de Bourso mais personnellement, en raison du ralentissement du cycle immobilier, nous aurions préféré que la société conserve ses précieuses cartouches.

- Difficile de porter un jugement sur la qualité de la direction de LNC mais pour l’instant elle nous donne une certaine satisfaction :

Olivier Mitterand a connu la crise du début des années 90 et le fait qu’il y ait laissé des plumes est plutôt de mon point de vue un signe positif (on peut penser qu’il ne répétera pas certaines erreurs du passé). De plus, l’anticipation de la crise me semble correcte avec un arrêt des développements en Espagne, un ralentissement des développements en France et une volonté de croissance en Europe de l’Est. Un regret tout de même : l’augmentation des stocks au
31/12/2007 qui, même si elle reste raisonnable, me semble tout de même un peu audacieuse en fin de cycle immobilier.

- Au 31/12/2007, nous ne voyons aucune trace dans le rapport de gestion de LNC d'une seul immeuble complètement achevé et invendu.

3 commentaires:

Anonyme a dit…

Il y a quand même un élément plus qu'inquiétant: une dette de plus de 300 millions d'euros.

Valeur & Conviction a dit…

Nous ne pouvons que vous renvoyer vers les différents articles que nous avons rédigés depuis que nous suivons cette société. Vous verrez que la question de l'endettement a été évoqué à plusieurs reprises.

Voici les liens vers ces artiles :

http://valeurconviction.blogspot.com/2008/01/arbitrage-de-van-de-velde-pour-les.html

http://valeurconviction.blogspot.com/2008/04/les-nouveaux-constructeurs-mise-jour.html

http://valeurconviction.blogspot.com/2008/06/lnc-toujours-plus-bas.html

http://valeurconviction.blogspot.com/2008/08/les-nouveaux-constructeurs-update.html

fbooo a dit…

Le titre est un peu mal choisi:
"LNC : un sort identique à Céléos ?"
Monsieur OM, Président a racheté massivement ses actions (et continue).
Il me semble qu'un actionnaire qui détient 70% du capital et qui achète encore de ses actions, n'est pas sur le point de connaitre "le même sort que Céléos".