lundi, juin 30, 2008

« Investir dans la Valeur de Benjamin Graham à Warren Buffet »

par Bruce Greenwald (1er épisode)

La lecture de ce livre par quelques-uns d’entre nous fut une révélation. Si « L’investisseur Intelligent » est considéré comme la bible des investisseurs « value », nous pouvons considérer qu’il ne s’agit que du premier opus, l’Ancien Testament en quelque sorte. « Investir dans la valeur » de Greenwald serait donc le Nouveau Testament …

En ces temps boursiers mouvementés, éprouvants et sujet de doutes pour tous les investisseurs y compris parmi les plus expérimentés, ce chef d’œuvre représente à la fois une véritable cure de jouvence et un retour au fondamentaux de l’investissement.

La lecture de cet ouvrage a donné lieu, entre nous, à des débats passionnés et passionnants, sur les interprétations que nous pourrions avoir.

Nous vous proposons, pendant quelques semaines, de découvrir, non pas le contenu du livre que nous vous conseillons de découvrir par vous-mêmes (il vaut largement la trentaine d’euros à débourser pour son acquisition), nous vous proposons disions-nous de partager avec vous le cheminement de nos réflexions et la méthodologie que nous avons tenté d’élaborer afin de devenir de meilleurs investisseurs dans la
valeur …

Et, afin de rendre nos « élucubrations » plus concrètes, nous avons appliqué les méthodologies préconisées à une entreprise que nous avons déjà présentée, il s’agit de notre distributeur favori : Colruyt.

Notre réflexion a eu lieu alors que les comptes 2007-2008 de Colruyt n’étaient pas encore disponibles. Nous avons donc travaillé sur la base des données 2006-2007.
Ajourd’hui, nous vous proposons de nous pencher sur la « valeur d’actif net net »

L'actif net- net

Nous proposons de ne pas s'attarder sur cette valeur. Cette méthode était préconisée par Graham consiste à ne s'intéresser qu'à l'actif circulant dont la valeur comptable est souvent proche de la valeur vénale. De cet actif circulant, Graham déduisait les dettes de la société pour obtenir le fonds de roulement "net net" valorisant l'entreprise. Graham préconisait cette approche parce que, selon
lui, l'actif circulant était celui dont l'estimation était la plus fiable.
Les immobilisations recelant pas mal de valeurs sujette à interprétation (par exemple un goodwill énorme chez Toupargel, issu du rachat d'Agrigel ou des frais de maintenance de site internet considérés comme des immobilisations chez Acheter-Louer).

Seul problème, Graham a commencé sa carrière peu après le crash de 1929, époque à laquelle un grand nombre de sociétés étaient sous évaluées. Selon Greenwald, les actions "net net" ont pratiquement disparu aujourd'hui (notons tout de même, au sein des valeurs dont nous vous avons parlé, la valorisation des Nouveaux Constructeurs qui, au cours actuel de 4,80 euros, cote à moins de 40 % de sa valeur d’actif net net.

En ce qui concerne Colruyt, il est évident, bien avant de passer à l'évaluation proprement dite, que notre distributeur favori cote largement au-dessus de cette valeur nette-nette. Néanmoins, à titre d'exercice, nous avons effectué cette valorisation. Nous prenons comme base de travail les comptes annuels 2006-2007,
pages 51-52. A l'actif circulant, nous passons en revue les différents postes :
Tout d'abord le poste "stock". C'est celui sur lequel nous nous attardons le plus parce qu'il nous semble que, parmi tous les postes de l'actif circulant, c'est celui qui pourrait être le plus sujet à caution car le plus difficilement contrôlable par les commissaires aux comptes. Afin de vérifier la fiabilité de la valeur mentionnée dans les comptes, nous vérifions d'abord les méthodes d'évaluation utilisée par la
société (p 62). On indique que les stocks sont valorisés selon la méthode FIFO ce qui signifie qu'on considère que les marchandises sont considérées être sorties du stock dans l'ordre dans lequel elles sont entrées (First In, First Out). Cette méthode nous semble cohérente en fonction de l'activité de distributeur de Colruyt même si, les prix ayant plutôt tendance à augmenter avec le temps, on pourrait
assister, en cas de mauvaise rotation des stocks, à une légère surévaluation.

Après avoir vérifié la pertinence des règles d'évaluation, nous vérifions la part relative du stock par rapport aux achats de l'année pour les 5 exercices qui précèdent (nous divisons le montant total des achats de marchandises par le montant du stock) et nous obtienons les résultats suivants :

2006 : 10,11
2005 : 9,85
2004 : 8,63
2003 : 9,17
2002 : 9,03

soit une moyenne de 9,36

Pour 2007, ce rapport est de 10,17. Autrement dit, le montant repris en stock est proportionnellement moins élevé par rapport à la moyenne de cette valeur des 5 exercices précédents. Nous pouvons en tirer deux enseignements : tout d'abord, le stock a connu une rotation plus rapide en 2007 que sur la moyenne des 5 derniers exercices et d'autre part, il y a peu de chance qu'en présentant un stock aussi faible par rapport aux achats de l'année, il y ait des "nanards" dans le stock de
Colruyt. Nous considèrons donc la valeur du stock de Colruyt comme correcte.
Les autres postes de l'actif circulant sont, en principe, plus facilement contrôlables par les commissaires aux comptes et gérables par la direction. Nous pensons que l'on peut les reprendre tels quels.

Nous reprenons la valeur totale de l'actif circulant de Colruyt, soit 1 076 500 000.
Ensuite, nous déduisons les dettes. Pas de remarques particulières à ce sujet si ce n'est que nous incluons les provisions dans les dettes : certains auteurs les considèrent comme des quasi fonds propres mais étant donné qu'il s'agit de couvrir des charges futures probables et non certaines, nous retienons quant à nous le terme "probable" et incluons donc les provisions aux dettes de l'entreprise. Les dettes de Colruyt s'élèvent à 1 041 700 000.

La valeur d'actif net net de Colruyt est donc de 34 800 000 euros soit 1,05 euros. Le rapport cours/actif net net de Colruyt est donc de plus de 150. Comme nous nous y attendions, il n'y a aucun enseignement particulier à tirer de ce calcul si ce n'est de mettre en exergue les rares cas de sociétés qui cote à une valeur cours/actif net net inférieur à 1 voir légèrement supérieur à 1.

La semaine prochaine, nous aborderons la valeur de renouvellement de l’actif.

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